Interviewer Bruno Dumont n'est pas chose aisée. Le rencontrer signifie souvent devoir se départir de la préparation qui aura été faite en amont, tant le cinéaste aime s'agripper à des mots, sans toujours écouter vos questions jusqu'au bout. Il faut donc avancer par à-coups, reposer les questions, ou les poser en plusieurs parties, pour arriver à colmater toutes les brèches, à apporter toutes les réponses. Retranscrire une interview de Bruno Dumont est donc également compliqué, tant cela relève parfois du puzzle, du collage. Le présent entretien, remis au propre, est donc une version expurgée de ces allers et retours complexes. Mais cela rentre finalement en écho avec la forme du nouveau film du réalisateur, L'Empire, dans lequel il tente de simplifier sa vision du bien et du mal, en faisant appel au genre du space opera et au cinéma de divertissement en règle générale. En résulte une version « populaire » de La Vie de Jésus, dont le film est un « préquel » crypté. À travers l'opposition manifeste du bien et du mal et leur fusion finale, Bruno Dumont raconte la genèse de la nature humaine tout en revenant à l'origine de son cinéma.