« Coincoin et les Z'inhumains » : L'identité frontalement biaisée
Avec Coincoin et les Z'inhumains, Bruno Dumont continue à saborder le naturalisme des représentations et des identités : dans la farce et les éclats de rire carnavalesques s'annonce la fête des masques identitaires rendus, abattus et révélés dans leur facticité bariolée.
« Coincoin et les Z'inhumains », une série de Bruno Dumont (2018)
Proposition : la France profonde parle un français qui foule aux pieds la langue académique des laudateurs médiatiques de la France profonde. Corollaire : la Côte d'Opale est ce terrain d'expérimentation cinématographique où la France profonde ressemble au fond si peu à ce qu'on croit qu'elle est. Le choronyme chatoyant qui sonne si bien à l'oreille des touristes devient dans la grâce joueuse et rieuse d'un geste de cinéma le site d'accueil de quelques monstres nés de l'accouplement du démontage redoublé des lieux communs d'ici (la Picardie et le pittoresque de la culture chtimi) et des clichés d'ailleurs (le cinéma de genre, l'enquête policière et la traque au tueur en série). Au principe de son grand succès public et critique, l'enthousiasme suscité par P'tit Quinquin (2014) était alors porté par les ailes d'une manière si réjouissante de dévergondage que le format de la série télévisée autorisait Bruno Dumont à sortir précisément de ses gonds habituels en faisant de la fantaisie comique l'opérateur du dernier déboulonnage du naturalisme mystique qui a longtemps qualifié son geste de cinéma. Comme si la paire romaine des deux Georges (Bataille et Bernanos) allait se faire voir chez ces drôles de Grecs que sont René Clair et Jacques Tati. Le naturalisme est cette mécanique trop bien huilée qu'il faut désormais gripper pour en faire dérailler les chaînes usinières, et le comique est ce grain de sable toujours disponible au grippage.
On n'oublie toujours pas que le rire est celui d'une franchise qui s'acoquine si aisément avec la frontalité des plans, la vis comica appartenant d'abord et avant tout aux corps eux-mêmes, acteurs non professionnels trouvés sur place qui, en toute connaissance de cause, s'amusent à faire ce qu'ils font, font, font et défont. Tous entrés dans la danse, ils forment une ronde qui circonscrit en la limitant nullement la zone d'une indistinction aussi troublante que ludique, l'endroit qui est cet envers où s'ajointent sans jamais se confondre le documentaire de ce qu'ils sont et la fiction dans ce qu'ils font. On obtient ainsi un mixte singulier de frontalité (le réel des lieux et des corps) et d'anamorphose (le recours délirant aux conventions du cinéma de genre et le surenchérissement dans leur irréalisme), la frontalité toujours déjà retournée et diagonalisée (la réalité documentaire compose ainsi avec ce biais qu’est pour l’imaginaire sa propension à l'irréalité). La représentation aussi frontale que biaisée (la fiction nomme ce biais qui n'appartient pas à l'auteur seul mais se tient à équidistance, comme un milieu partagé, entre un regard amusé et des corps qui s'y exposent et répondent présent en acceptant de jouer le jeu avec la plus grande hilarité et le plus grand sérieux).
L'enthousiasme n'est ainsi que la conséquence d'un humour communicatif en ce sens qu'il communique partout, qu'il passe et rebondit partout via les écarts et les jointures, dans les postures et les parlures, dans les bafouillages et les mimiques, dans les gesticulations et les borborygmes, dans la drôlerie des caractères et le surrégime fou des situations, arrachant ainsi la création originale de quelques archétypes depuis la glaise reconnaissable des stéréotypes accablant l'ordinaire représentation du peuple à l'écran. L'enthousiasme est bien alors celui d'un burlesque d'ici, non seulement incarné mais assumé et réfléchi par les corps réellement cabossés qui en sont les vecteurs privilégiés, qui savent moins rire d'eux-mêmes qu'ils rient sciemment du malmenage bordélique des clichés auquel ils participent gaiement. Peuplant comme les doubles bancals d'eux-mêmes la frange intervallaire des clichés les bordant de tout côté, Alane Delhaye et Lucy Caron dans les rôles respectifs de P'tit Quinquin et Eve Terrier, Bernard Pruvost et Philippe Jore respectivement dans ceux du commandant Van der Weyden et du lieutenant Rudy Carpentier, les personnages tiennent vaillamment le point qui est l'écart non réductible entre la dune des images d'Épinal et la vague des tropes de feuilleton policier. Et cet écart appartient pleinement à l'esthétique du cinéma qui est un art des déplacements comme autant de déliaisons – les « délacements » chers à Édouard Glissant – et des mobilités dans l'intervalle diagonale des places assignées.
Les gardiens rigolards du lard de nos contradictions
Certes, on sentait dès l'enquête policière résolument improbable de L'Humanité (1999) que Bruno Dumont avait envie de dérégler la machine de mimesis au principe du réalisme cinématographique tel que le naturalisme français en livre aujourd'hui la variante moins hard (le cinéma de Maurice Pialat) que soft (les films de Stéphane Brizé). Mais le désert nihiliste de la pulsion (Twentynine Palms en 2002) ou les déséquilibres mal négociés de la guerre allégorique clivée entre le très concret et le trop abstrait (Flandres en 2005) retardaient l'émancipation esthétique d'un auteur par trop redevable encore de la bonne vieille dialectique (pascalienne) de l'ange et de la bête (ou, pour le dire avec les mots classiques de Simone Weil, de la pesanteur et de la grâce). Le naturalisme est une seconde nature à laquelle il est encore difficile de se soustraire, même si y aide la rose cardinale du matérialisme spirituel de Robert Bresson (l'auteur des films voisinant le plus avec le naturalisme, ceux justement adaptés de Georges Bernanos comme Journal d'un curé de campagne en 1951 et surtout Mouchette en 1967). C'est seulement à partir de Hadewijch (2009), ce film quelque peu mésestimé qui est le grand film de la rupture, suivi par Hors Satan (2011) et Camille Claudel 1915 (2013) que Bruno Dumont aura su progressivement reconfigurer une manière propre où les corps sont moins les gardiens des rapports contradictoires du matériel et du spirituel qu'ils jouent selon une gamme toujours plus attendue et diversifiée avec les réflexes, implicites ou attendus caractérisant un tel gardiennage. Les gardiens ne le sont alors qu'à être rieurs, qu’à être les joueurs rigolards du gardiennage du lard de nos contradictions, avec un sérieux qui ne peut être que celui de l'hilarité. Parce qu'entre la bête et l'ange, il y a de quoi rire en effet après avoir tant pleuré.
Le jeu consistant dans les déboîtements gracieux du désœuvrement, la grâce bancale qui suspend les réflexes bestiaux de l'animal bizarre que donc nous sommes, l'emportent franchement avec P'tit Quinquin. Ont suivi Ma Loute (2016) et Jeannette, l'enfance de Jeanne d'Arc (2017) qui accentuent, contre toute idée pessimiste d'une volonté qui ne serait que celle de la naturalité, l'hybridation joyeuse et bordélique des formes hétérogènes composant un habit d’Arlequin pour les corps sous-exposés. L'impureté n'est plus le drame des contradictions humaines trop humaines. Son éternel retour est désormais une kermesse, un carnaval, une fête : une parodie (on se souvient que c'est ainsi que Pierre Klossowski a compris à juste titre l'éternel retour nietzschéen). Et l'impureté n'est pas moins parodique que la pureté, elle a seulement l'avantage de le savoir. Et par surcroît d'en rire en rigolant à pleines dents en mordant dans le lard des dénis qui appartiennent à une pureté qui s'est longtemps crue originaire et qui n'est plus désormais qu'une parodie de second degré. Dans les lieux situés où se perpétue la domination des figures assignées à résidence (à la suite des Flandres s'imposant avec La Vie de Jésus en 1997, la Côte d'Opale se présente comme le nouveau terrain de jeu privilégié à partir de Hors Satan), s'y joue et rejoue donc une passion recommencée pour la désidentification comme repeuplement baroque des imaginaires asséchées par la désertification engagée par le jeu consensuel des représentations. Des restes de naturalité persistent cependant (Ma Loute est ce film où tout arrive à l'étrange exception de la relation homosexuelle, l'Arabe confondu avec le musulman reste dans P’tit Quinquin un symptôme avant d'être un personnage à part entière). Quant au tout récent croisement des textes adaptés, l’agencement adopté favorise à la fin un équilibre somme toute consensuel des visions de la nation qui ferait encore défaut (Jeannette s'offre ainsi au bon plaisir des lecteurs socialistes comme catholiques de Charles Péguy, les uns qui indexent la question sociale sur celle de la souveraineté, les autres qui subsument la question sociale sous le salut de l'identité nationale).
Clownerie de nos clones, aliens de nos aliénations
Avec Coincoin et les Z'inhumains, la saison deux de P'tit Quinquin tournée quatre ans après propose, toujours en quatre épisodes de 52 minutes environ, à la fois le retour d'une formule gagnante, le glissement du jeu avec les conventions de genre (la science-fiction se substitue dorénavant au polar), surtout l'exagération voire l'exaspération carnavalesque de ses procédures propres. Proposition : l'identité nationale est une bouse intersidérale, l’identique une merde intergalactique. Corollaire un : les aliens exposent la vérité aliénée de l'identité quand elle est fétichisée. Corollaire deux : les clones de l'espace exposent la vérité clownesque de la passion identitaire. On est d'abord stupéfait par le minimalisme renfrogné, quasi-monomaniaque, têtu au risque de l’obtus d'une nouvelle saison qui s'accroche à quelques motifs fonctionnant comme des leitmotivs (une glu noire qui tombe du ciel bleu s'ajoute désormais aux facéties routières et voiturières réitérées de Carpentier, c'est plus fort que lui, moins une nature qu'une convention déguisée en seconde nature). La ritournelle de l’éternel retour (l'étrangeté qui stupéfie s'extrait des mines d'un quotidien considéré dans la sidérante diplopie d'un regard à la fois frontal et de biais) s'affaiblirait-elle cependant en rengaine du sempiternel retour du même (l'enfant Quinquin devenu l'adolescent Coincoin ne changerait presque rien à une affaire seulement intéressée à la reprise à peine variée, peut-être avariée, d’une formule à succès). On se réjouit cependant que l'enquête censément portée sur une matière noire d'origine extraterrestre ayant la faculté de faire accoucher les victimes qu'elle contamine de clones d'eux-mêmes piétine au point où, effet de diplopie encore, la reprise du thème paranoïaque de L'Invasion des profanateurs de sépultures se superpose à sa version franchouillarde offerte par Le Gendarme et les extraterrestres. Mais l'on regrette aussi, au nom du piétinement burlesque et ravageur des clichés d'ailleurs (les extraterrestres et l'enquête scientifique) et d'ici (le bloc des identitaires et le groupe nomade des migrants), la dissipation des moments de grâce (l'amour de deux enfants suspendant la condamnation du faux coupable), de trouble (l'insistance à souligner la connivence de Van der Weyden avec le tueur demeuré introuvable), comme de tragédie (la fille jetée aux cochons avec le savoir de l'horrible et impartageable vérité, le garçon racisé qui retourne contre les autres et contre lui-même le stigmate d'une religion honnie) qui ponctuaient P’tit Quinquin.
Pourtant, à force de piétinement, Coincoin et les Z'inhumains fait du surplace le moyen de creuser le trou par le biais duquel la rengaine (la répétition statique du même) arrive encore à se faire ritournelle (la répétition dynamique de la différence). Quinquin, Coincoin : les onomatopées n'indiquent pas seulement le règne enfantin des chansons d'antan et des bandes dessinées mais, au risque burlesque de l'infantile, elles martèlent aussi la puissance de création de la répétition en frappant la scansion de la possibilité, aussi mince soit-elle, de la différenciation créatrice. Il y faudra un trou pour assurer de tels passages qui sont des conversions, monétaires mais pas uniquement (il faut tenir les bords de l'identique et du nouveau pour garantir certes un autre succès rentabilisé), non seulement symboliques (l'infantilisme du burlesque est un moyen de faire enfance en renouant avec l'enfant que nous ne sommes plus) mais également diaboliques (la conversion rieuse de l'ange au diable rigolard de la parodie). De quel trou s'agit-il donc ? Burlesque oblige, les connotation excrémentielles pleuvent. Ici littéralement. En substituant à la vieille tarte à la crème les flaques d'une matière bitumeuse et noire comme l'outrenoir de Pierre Soulages. En faisant encore des corps contaminés des figures rabelaisiennes qui n'ont pas d'autre réflexe que de se dédoubler, autrement dit de se chier eux-mêmes dans la confusion accomplie des simulacres et des originaux. La France profonde ne tient comme cliché vivant qu'à être investie depuis son fondement – métaphoriquement, depuis son cul. C’est-à-dire la passion régressive de l'entre-soi, où vivre du pareil au même relève d’un mixte de tendances merdeuses et de pulsions flatulentes. On saisit ainsi le privilège accordé au fait que ce sont les nationaux qui sont exclusivement victimes de la boue noire intergalactique. Le bloc local des identitaires attire ainsi à lui la multiplicité des doubles comme un aimant la limaille de fer. Van der Weyden compris, dont les joues gonflées s’acoquinent parfaitement avec la pétomanie ambiante. Jusqu'à l'avènement d’un ménage à trois et, même, la suspicion d'une pente partouzarde. De leur côté, les migrants, déliés de toute altérité monstrueuse, restent cependant un groupe épars et de fait malheureusement soustrait à tout désir fictionnel de singularisation individuelle. Pareillement, l'amour homosexuel d'Eve et d'une copine agricultrice, qui pourrait valoir comme repentir au jeu finalement contrarié et borné avec le genre sexuel de Ma Loute, se voit cependant corrigé ici par la survenue du double de l'héroïne, qui peut un moment offrir à Coincoin la promesse d'une reprise de leur amour d'enfance. De toute façon, Coincoin a le loisir de revenir au bercail de la norme hétérosexuelle avec Jenny (Alexia Depret), grande ado pimbêche et sexy, aussi mignonne que cassante, qui lui offre tous les cris nécessaires à suppléer avec la simulation des orgasmes l'absence de tout rapport sexuel, longtemps full frontal chez Bruno Dumont, désormais et significativement hors-champ.
La farce est une faim qui donne des ailes
La naturalité est une seconde nature, c'est une seconde peau, une peau de lapin s'accrochant à la couenne du cinéma de Bruno Dumont qui doit encore travailler à peaufiner les moyens de biaiser les exigences frontales du conatus. Mais, il faut a contrario marquer que l'hétérosexualité ne revient ici que sous les espèces significatives du simulacre, du double d'Eve aux simulations vocales de Jenny. L'affaire n'est donc pas si simple, elle l'est en tous les cas moins que la démultiplication du même par le même censée effrayer davantage que des migrants qui ne font rien moins ici que se poser ou passer. L'inhumain est le propre du même qui n'est pourtant, circulairement, que l'autre de l'autre. C'est la maladie auto-immune du propre qui ne sait pas que ce qu'il déteste en l'autre c'est lui-même. La phobie de l’impropre débouchant plutôt logiquement sur la régression excrémentielle. L'identité a longtemps été une tragédie, elle l'est encore, ce n'est pourtant, ontologiquement, qu'une farce. Voilà de quoi il faut se bidonner en désœuvrant la polarité toujours déjà biaisée de l'identité et de l'altérité, en suspendant la dialectique infernale des uns contre les autres, en neutralisant la rengaine du nous contre eux. Comme on crèverait un ballon rempli de gaz intestinal.
C'est alors qu'arrive la fin de Coincoin et les Z'inhumains et s'y joue un petit miracle aérien. Puisque le récit s'ingénie à se tenir au programme du piétinement narratif afin de mettre au rencart le désir d'une conclusion résolutoire, il y a tout lieu alors de faire advenir autre chose. Par exemple une fanfare. Dans la cour d'une ferme, tous les personnages arrivent, précisément tous reviennent, des épisodes précédents (on voyait bien traîner çà et là des figures déguisées et quelques géants), de la saison précédente (les cadavres sont devenus des zombies), même des autres films (outre un finale en forme de ronde fellinienne rejouant déjà la fin de Ma Loute, on retiendra surtout le retour émouvant d'Emmanuel Schotté, presque vingt ans depuis L'Humanité). Vivants, revenants, morts-vivants : la mort elle-même n’est pas moins parodiée par le carnaval des zombies. Ce qui est beau, c'est que la chanson créée par Lisa Hartman et entonnée deux fois mémorables à l’occasion de la saison précédente (« Cause I Knew That It’s You ») est devenue désormais un air générique sublimant les flatulences de l'identique. C'est comme un hymne chanté par tout le monde, allochtones et autochtones, enfants et adultes, acteurs de premier plan et figurants, et puis d'autres encore. Ce qui est émouvant alors est qu'il y a à l'écran une troupe bigarrée faite de personnes qui ne se seraient autrement jamais rencontrées, et qui s'amusent au cirque du cinéma dont la baraque foraine retrouvée s’amuse, ici comme dans le Twin Peaks de Mark Frost et David Lynch, à biaiser les rapports oppositionnels et catégoriques du cinéma et de la télévision. N'empêche, nous diraient alors les figures présentement rassemblées, on aura bien ri et il n'y a rien de moins sérieux que l'hilarité générale et communicative.
Voilà donc la vérité du monde, elle est rien moins que carnavalesque, c'est un carnaval des identités dénaturalisées, la fête des masques identitaires rendus, abattus et révélés dans leur facticité bariolée. Jean Renoir, Max Ophüls ou Alain Resnais y auront insisté en leurs temps respectifs. Voilà désormais la vérité du cinéma de Bruno Dumont comme celui-ci n'avait peut-être jamais osé l'exposer ainsi auparavant : le naturalisme des représentations et des identités n'est qu'une farce qu'il faut assumer alors dans ses artifices en l'ouvrant à tous, à égalité et sans exclusive, dans l'accueil hospitalier des corps périphériques parmi les moins désirés du cinéma français. On comprendra alors ici la tonalité amusée d'un générique entre fanfare et animation qui lorgne explicitement du côté de l'émission de télévision belge Strip-tease dont le cinéma de Bruno Dumont, à qui on a dû faire plus d'une fois le reproche de s’en approcher de trop près, constitue en réalité le vrai faux jumeau avoué. Chaque film serait alors comme le site recommencé d'une hospitalité invitant ses hôtes à désœuvrer les passions de l'hostilité. Le carnaval est si plein, criard et généreux comme un œuf, qu'il envoie la fin de saison voler très haut en effet (la fête est comme toute fête dotée d'une grande force antigravitationnelle, preuve d'une série littéralement gonflée). En même temps qu'il ne résout absolument rien des positions réelles, de classe, de genre et de race, qui ne s'évanouissent pas avec la virevolte baroque et ludique des masques identitaires. Jusqu'à ce que tout cela, considéré depuis le point de vue de Sirius (celui de Dieu ou des Oiseaux d'Alfred Hitchcock, référence assumée), finisse dans l'estomac d'un goéland (ou une mouette, volatile rieur s'il en est). Ce qui reste est assurément l'expression d'un désir qui se reconnaît comme faim qui donne des ailes.
On verra bien alors si ces ailes rieuses autoriseront Jeanne d'Arc, dont la suite des aventures est actuellement en cours d'élaboration, à la faire s'envoler plus haut que son enfance à demi-convaincante. Ou bien, moins comme le goéland ou la mouette que comme l'albatros, si ses ailes de géant l'empêcheront une nouvelle fois de marcher en diagonale des marcheurs droits dans leurs bottes de l'identité nationale.
Poursuivre la lecture sur le cinéma de Bruno Dumont
- Thibaut Grégoire, « Ma Loute : Jouer ensemble ou jouer contre », Le Rayon Vert, 3 septembre 2016.
- Maël Mubalegh, « Prisonniers du désert : sur Terrence Malick, Bruno Dumont et Werner Herzog », Le Rayon Vert, 12 août 2016.